La bienfaitrice

de Élisabeth Von Arnim

2,5/5

Anna vient d’avoir 25 ans et n’est toujours pas mariée, ce qui n’est pas acceptable aux yeux de la société anglaise de ce début du 20e siècle, ni pour sa belle sœur Susie, la femme de son frère, qui aimerait bien enfin se décharger d’Anna auprès d’un mari bien nanti. Tout change pour Anna lorsqu’elle reçoit en héritage de la part de son oncle Joaquim, une maison au milieu de nulle part en pleine Poméranie, en Allemagne, propriété qui permettrait à Anna de toucher 200 £ par an. Elle part donc en Allemagne pour voir en quoi consiste son héritage, en compagnie de Susie, Letty sa nièce et Melle Leech, la préceptrice de Letty. En arrivant dans sa nouvelle demeure, elle se sent enfin libre et indépendante, n’ayant plus besoin de personne pour subvenir à ses besoins et lui acheté la moindre chose. Elle est tellement heureuse, qu’elle décide d’ouvrir sa grande maison à douze dames de bonne famille qui aurait tout perdu, pour qu’elles soient enfin heureuses.

J’avais trouvé Avril enchanté plutôt sympathique et le résumé de ce roman en plus des bonnes critiques que j’ai lu sur plusieurs blogs, m’a donné envie de le lire.

On suit Anna, une jeune anglaise en terre allemande qui est plus qu’heureuse d’être libre, financièrement indépendante, sans avoir besoin de se chercher un mari. Elle décident d’accueillir douze femmes qui n’ont pas été heureuse et qui ne demandent qu’à vivre en paix. Anna est un personnage sincère, naïf, idéaliste, utopiste, rêveuse. J’ai bien aimé la voir partir sans trop réfléchir, prendre possession de son bien, et s’installer avec Letty et Melle Leech, la voir accueillir trois femmes plus une princesse désargentée qui accepte de devenir la gouvernante de la maison.

J’ai aimé la spontanéité de Letty, pour le meilleur et pour le pire, je l’ai trouvé attachante malgré ces bêtises. J’ai adoré lire les mesquineries de Madame von Treumann et la baronne, leur manière de dénigrer certaine personnes, la manière de critiquer Anna qui est pourtant celle qui subvient à tous les besoins financiers de ces dames qui vivent à ces crochets sans se rendre le moins du monde utiles.

Lire la cohabitation avec ces dames ingrates était intéressant. Là où Anna espérait gagner des amies, et vivre en harmonie et dans le bonheur avec elles, elle n’a gagner que deux sangsues qui ne seront jamais heureuses nulle part, trop aigries pour ça, entre une baronne tout le temps grincheuse, et une von Treumann qui tente désespérément à  marier son fils à Anna.

J’ai surtout adoré lire les conversations avec la princesse Ludwig, intelligente et pleine de bon sens, notamment la longue conversation qu’elle entretient dans le salon, avec les invités d’Anna, et les phrases à double sens, ou encore sa manière subtile pour éviter à Anna de se retrouver en tête à tête avec Karlchen, le fils opportuniste de Von Treumann.

On retrouve le style d’écriture de Von Arnim, son amour des descriptions de la nature, des jardins, et la cohabitation entre Anna, la princesse Ludwig, Von Treumann, la baronne et Kurhauber m’a un peu rappelé les vacances en commun des héroines de Avril enchainé.

Ce roman est donc très plaisant à lire et l’humour subtile de Von Arnim est toujours agréable à lire. Cependant, je n’ai pas réussi à m’attacher à Anna, que je trouve enfantin dans son comportement, qui a des réactions que j’ai du mal à saisir parfois, et qui a trop tendance à pardonner tout et n’importe quoi. Et puis surtout, ce qui m’a dérangé dans cette lecture simple, c’est la présence constante du mariage. Aucune femme ne peut rester célibataire, c’est un concept qui est inenvisageable pour tous les personnages, femme ou homme. Encore plus inenvisagable si la célibataire en question est jeune et jolie, si encore elle était laide, ça passerait peut être mieux, mais dans le cas de la jolie Anna, personne dans son entourage ne l’imagine restée célibataire, au point qu’on parle toujours d’elle comme une futur madame.

On sent cette pression de devoir absolument trouver un mari. La princesse Ludwig expliquera même à Anna, que le mariage n’est pas seulement fait pour avoir des enfants, et se mettre à l’abri du besoin, mais surtout parce qu’une femme seule est forcément perdue, incomplète, sans guide pour l’aider et donc vulnérable. Cette théorie on l’a lit tout au long du roman, jusqu’à en devenir lassant. Le roman finit par nous expliquer que l’idée de départ d’Anna, de vivre enfin libre et indépendante, sans avoir l’obligation de se trouver un mari pour la mettre financièrement en sécurité, était purement infantile, un rêve éveillé qui ne peut être que celui d’une petite fille qui ne vit pas dans la réalité mais dans le rêve. On comprend qu’à force d’entendre ces idées de tout cotés, Anna finisse par épouser son Von Lohm, à qui elle avait pourtant dit non une première fois, ne le considérant que comme un bon ami. L’auteur  nous montre donc que l’envie d’Anna d’être libre de toute contrainte, et libre sans avoir à rendre compte à un mari, est un échec, le bonheur ne se trouve pas totalement sans un mari.

En bref, une lecture agréable, une jolie plume, quelques moments de pure humour british, des rebondissements qui rendent le roman intéressant et jamais ennuyant, mais des idées sur la condition féminine et sur le mariage un peu étranges et trop dépassées pour me rendre les personnages attachants.

Lu dans le cadre du mois anglais organisé par Lou et Titine.

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7 réflexions sur “La bienfaitrice

  1. Merci pour ce nouveau billet… je n’ai toujours pas lu Von Arnim pour ma part, ce qui est assez étonnant quand même dans la mesure où je veux la lire et l’ai dans ma PAL depuis que je tiens mon blog… et ça remonte !

  2. Pingback: Billet récapitulatif mois anglais 2013 | Plaisirs à cultiver

    • je retenterais peut être cette auteure mais pas tout de suite, j’en ai d’autre d’elle dans ma PAL; mais jusqu’ici je n’ai pas eu de coup de coeur en la lisant!

  3. je ne connaissais pas non plus, mais l’avis de plusieurs blogueuse, notamment celui de keisha, m’avait convaincu. J’en garderais pas un souvenir impérissable mais c’est une lecture agréable.

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